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jeudi 26 novembre 2015

Marketing et Qualité


Il est toujours excessivement délicat d’aborder ce sujet. De nombreux débats publics houleux se sont déjà produits entre les spécialistes du marketing, et de la qualité.

Pour étudier les liens entre marketing et qualité, il faut se focaliser sur les échanges entre l’entreprise et les acteurs du marché visé par les biens ou services qu’elle produit. Pour mémoire, une démarche qualité peut s’appliquer, plus généralement,  à tous les échanges d’une entreprise avec son environnement.

Ces acteurs particuliers sont les consommateurs potentiels de ces biens ou services.

On peut définir le Marketing comme:
L’ensemble des actions qui ont pour objet de connaître, de prévoir et, éventuellement, de stimuler les besoins des consommateurs à l'égard des biens et des services et d'adapter les caractéristiques des prestations de l’entreprise et leur commercialisation aux besoins ainsi précisés.

De son côté, la qualité d’un bien ou d’un service, est un qualificatif synthétique qui découle d’un jugement global d’un consommateur (jugement qualité) qui s’établit à partir des critères élémentaires suivants. Ces critères varient en fonction des différentes étapes des échanges.

Ils peuvent se décrire de la manière suivante :

·         valeur attribuée aux espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service;
·         rentabilité espérée des efforts à fournir pour se procurer le bien ou le service ;
·         niveau de confiance initial dans la capacité du système de production du bien ou du service à respecter les spécifications annoncées du bien ou du service ;
·         valeur attribuée aux variations d’espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service au cours des échanges avec l’entreprise ;
·         niveau d’ajustement de la rentabilité espérée des efforts à fournir pour se procurer le bien ou le service  au cours des échanges avec l’entreprise ;
·         valeur attribuée aux variations de la confiance dans la capacité du système de production du bien ou du service à respecter les spécifications annoncées du bien ou du service ;
·         niveau de conformité constaté, du bien ou du service, aux spécifications annoncées
·         valeur attribuée aux facilités d’accès et d’usage du bien ou du service ;
·         valeur attribuée à la satisfaction perçue des usages réels du produit ou service comparée aux espoirs de satisfaction initiaux.
·         Rentabilité des efforts globaux fournis pour utiliser le bien ou le service

Une démarche qualité focalisée sur les consommateurs potentiels de biens ou de services peut se définir de la manière suivante :

Ensemble d’actions, qui agissent sur les jugements de la qualité des consommateurs de biens ou services de l’entreprise, pour assurer le maximum de chances de puiser, dans les échanges avec eux, les ressources dont elle a besoin.

Il est clair que si ces deux définitions sont admises, le marketing est une composante essentielle d’une  démarche qualité.

Une démarche qualité comporte trois grandes étapes :

La première étape consiste à provoquer, de la part des consommateurs potentiels, des jugements qualité prédictifs qui leur donnent l’envie de se procurer les biens ou services malgré les efforts qu’ils pensent devoir fournir : pour se conformer aux modes de rémunération attendus de l’entreprise, pour se les approprier et les utiliser, et malgré l’offre de la concurrence.

Les critères des jugements qualité prédictifs sont :
·         valeur attribuée aux espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service;
·         rentabilité espérée des efforts à fournir pour se procurer le bien ou le service ;
·         niveau de confiance initial dans la capacité du système de production du bien ou du service à respecter les spécifications annoncées du bien ou du service ;

La deuxième étape consiste à provoquer des jugements qualité, au cours des échanges, qui maintiennent ou améliorent ces jugements qualité prédictifs sans diminuer les espérances de l’entreprise portant sur ses modes de rémunérations ;
 
Les critères des jugements qualité des consommateurs au cours des échanges des biens ou services en contrepartie de la rémunération de l’entreprise sont :
·         valeur attribuée aux variations d’espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service;
·         ajustement de la rentabilité espérée des efforts à fournir pour se procurer le bien ou le service ;
·         valeur attribuée aux  éventuelles variations de la confiance dans la capacité du système de production du bien ou du service à respecter les spécifications annoncées du bien ou du service ;
·         niveau de conformité constaté, du bien ou du service, aux spécifications annoncées

La troisième étape est de vérifier que les jugements qualité finaux des consommateurs sont considérés par eux comme au moins aussi attractifs que leurs jugements qualité prédictifs et que l’entreprise a obtenu au moins les rémunérations attendues.

Les critères des jugements qualité finaux des consommateurs sont :
·         valeur attribuée aux facilités d’accès et aux modes d’usage du bien ou du service ;
·         valeur attribuée à la satisfaction perçue des usages réels du bien ou service comparée aux espoirs de satisfaction initiaux ;
·         Rentabilité des efforts globaux fournis pour utiliser le bien ou le service.

Les contributions du marketing à une démarche qualité peuvent se résumer dans le tableau suivant.

 
 
 
Fonctions
du marketing
 
Nature des contributions du marketing à une démarche qualité
 
 
Provoquer un jugement qualité prédictif
 
 
Provoquer un
jugement qualité en cours de mise à disposition
 
Vérifier la pertinence du
jugement qualité au cours, et à l’issue  de l’appropriation et de l’utilisation
 
Connaître les besoins
Susceptibles d’être couverts par le bien ou le service
valeur attribuée aux espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service
valeur attribuée aux variations d’espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service
 
 
Prévoir les besoins qui seront réellement  à couvrir
valeur attribuée aux espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service
 
valeur attribuée aux variations d’espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service
 
 
Stimuler des besoins latents
 
valeur attribuée aux espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service
 
valeur attribuée aux variations d’espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service
 
 
Contribuer au choix des caractéristiques du bien ou du service qui répondront aux besoins
 
 
valeur attribuée aux variations d’espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service
 
 
Contribuer aux scénarii des processus de commercialisation pour mettre en valeur ces caractéristiques
 
 
 
valeur attribuée aux variations d’espérances de satisfaction des usages envisagées du bien ou du service
 
 
Valider les impacts de ces caractéristiques sur les perceptions de satisfaction des besoins
 
 
valeur attribuée aux facilités d’accès et d’usage du bien ou du service 
 
valeur attribuée à la satisfaction perçue des usages réels du produit ou service comparée aux espoirs de satisfaction initiaux
 
Rentabilité des efforts globaux fournis pour utiliser le bien ou le service
 
 

 

 

 

jeudi 12 novembre 2015

Une innovation de qualité c’est quoi ?


La question est souvent posée, et la littérature fournit peu de réponses.
Deux concepts sont réunis : « qualité » et « innovation »
Rappelons la signification que nous donnons à ces deux termes.
Le concept de qualité
La qualité d’une activité, ou d’un état, est un qualificatif qui découle d’un jugement global qui résulte d’une synthèse de quatre jugements plus élémentaires portant sur  :
·    l’espérance d’une satisfaction, de la finalité de l’activité ou de l’état, qui justifie les efforts demandés pour en bénéficier ;
·       la confiance dans la capacité du système de production de l’activité ou de l’état à se conformer au descriptif de la finalité;
·       la conformité de la réalisation de l’activité ou de l’état au descriptif de la finalité ;
·       la confirmation des espoirs initiaux de satisfaction par la perception de l’activité ou de l’état, et de leurs effets.
Ce jugement peut être porté par toute personne concernée ou partie prenante de l’activité ou de l’état.
On appelle : « partie concernée » par une activité, ou un état tout acteur socio-économique conscient de l’existence de l’activité ou de l’état.
 
On distingue dans les parties concernées, les parties prenantes qui sont les acteurs qui misent sur l’activité, ou l’état  pour en retirer un bénéfice.
 
Et parmi les parties prenantes on distingue les producteurs de l’activité ou de l’état, des consommateurs.
 
Un consommateur, et un producteur d’une activité ou d’un état,  ne qualifient pas toujours de la même manière sa qualité. Deux consommateurs ne portent pas toujours le même « jugement qualité » sur une activité ou un état.

Un « jugement qualité » est un jugement porté par un acteur sur une activité ou un état qui permet de lui attribuer un certain qualificatif de qualité.

On peut facilement admettre que chaque partie concernée porte un jugement qualité qui lui est propre sur une activité ou un état. C’est vrai, en particulier, lorsqu’il s’agit d’une innovation.

Le concept d’innovation
Une innovation est une activité ou un état qui n’existait pas et qui apportent une réponse originale à des besoins
Elle résulte d’une mise en relation d’idées nouvelles avec des besoins et d’une matérialisation progressive de ces idées  guidée par une projection dans un futur très incertain,
·         de ses modes d’utilisation pour satisfaire des besoins,
·         des retours sur investissements.

La qualité d’une innovation

Comment utiliser ces définitions pour préciser le sens  à donner à la qualité d’une innovation ?

On peut définir la qualité attribuée à une innovation par une de ses parties prenantes comme le résultat de son jugement qualité de l’innovation.
 
La qualité attribuée par une partie prenante à une innovation est donc une synthèse :
  • de son espérance d’une certaine satisfaction des prestations que lui fournira le processus d’innovation qui justifie les efforts à produire pour en bénéficier ;
  •  de la confiance qu’elle attribue à  la capacité du système de production de l’innovation à se conformer au descriptif de sa finalité ;
  •  de la conformité constatée de l’innovation au descriptif de sa finalité ;
  •   de la confirmation de ses espoirs initiaux de satisfaction par la perception qu’elle a des prestations fournies par le processus d’innovation. 
  Toute partie concernée, et en particulier toute partie prenante, porte un jugement qualité qui lui est propre sur l’innovation.
La seule composante des jugements qualité qui a le plus de chance d’être commune à toutes les parties prenantes est :
 
La conformité constatée de l'évolution de la configuration de l’innovation au planning initial

Ce constat de conformité n’est pas toujours une condition nécessaire pour provoquer un jugement qualité attractif d’une partie prenante. Elles peuvent fort bien accepter des non-conformités à condition que leur satisfaction réponde ou dépasse leurs espérances.
La conformité, qui est une plateforme commune de satisfaction dans le cas d’une production en série d’un produit ou d’un service, n’a pas la même importance au niveau d’une innovation.

Si le but est d’utiliser la qualité comme moyen pour assurer le succès économique d’une innovation, il faut s’intéresser in fine aux jugements qualité des investisseurs du projet,  et ne considérer les jugements qualité des consommateurs potentiels ou réels de l’innovation, ainsi que ceux des autres parties prenantes, que comme des moyens pour provoquer des jugements qualité des investisseurs.

Si, au contraire, le but est d’utiliser la qualité d’une innovation pour apporter une réponse à un besoin de la Société, alors il faut s’intéresser in fine aux jugements qualité des représentants  de la Société  en charge de l’évaluation des réponses de l’innovation aux besoins pré identifiés.

Les deux points de vue peuvent converger lorsque les représentants de la Société font partie des investisseurs du projet. Dans ce cas les réponses de l’innovation aux besoins de la Société pré identifiés sont des retours sur investissement au même titre que les retombées économiques pour les investisseurs économiques.

Notre expérience dans le domaine des dispositifs médicaux innovants nous à placer à certains moments du côté des investisseurs économiques, et à d’autres moments du côté des représentants de la Société, en évitant les conflits d’intérêts.

On a pu observer que la situation peut sembler complexe lorsqu’un investisseur est un médecin qui dépense beaucoup d’énergie pour que l’innovation apporte une réponse efficiente à un besoin médical non couvert ou insuffisamment bien couvert, et qui est également impliqué économiquement dans l’entreprise qui incube le projet.

Cette « mixité » socio-économique est de plus en plus fréquente, notamment dans les écoles d’ingénieurs ou les universités. Le personnel de ces établissements est souvent un représentant de la Société (fonctionnaire) et un investisseur économique. Et c’est ce double statut qui permet le développement des innovations dans ces structures.

Cette situation n’est pas un handicap. Au contraire, ces investisseurs particuliers ont un double intérêt à miser dans une démarche d’innovation : un intérêt de service public, et un intérêt économique. Ces deux intérêts ne sont pas antinomiques, mais au contraire en synergie.

Liens entre qualité et succès d’une innovation

Certains jugements qualité des différentes parties prenantes d’un processus d’innovation sont nécessaires pour qu’elles acceptent de miser dans le projet, c’est-à-dire de fournir au projet les ressources dont il a besoin pour atteindre sa finalité.
 
Ces ressources conditionnent son succès.

On peut classer les différentes parties prenantes d’un processus d’innovation de la manière suivante :

Les bénéficiaires qui misent sur le projet :

·         l’incubateur du projet
·         les investisseurs du projet
·         les membres de l’équipe projet
·         les cotraitants et fournisseurs du projet

Les bénéficiaires qui miseront sur les prestations qui intégreront l’innovation :

      les acteurs du futur système de conception et de production des prestations qui intégreront l’innovation
      la chaîne d’acteurs du marché potentiel de l’innovation

Les régulateurs sociétaux : ils représentent les intérêts de la Société. Ils peuvent imposer des contraintes, ou être des « facilitateurs »

Les échanges entre le projet d’innovation et ses parties prenantes sont spécifiques à chaque partie prenante. L’innovation est la finalité du projet, mais il doit offrir en plus des prestations variées à toutes ses parties prenantes pour obtenir leurs contributions.
Le jugement qualité de chaque partie prenante porte donc, en partie, sur le déroulement général du processus d’innovation, mais aussi sur la manière dont le projet lui fournit la prestation personnelle attendue.

Les informations recueillies portant sur les jugements qualité « prédictifs » des acteurs du marché potentiel contribuent aux jugements de confiance attribués par les autres parties prenantes dans la capacité du système de production de l’innovation à se conformer au descriptif initial des prestations que le projet doit leur fournir.

Les jugements qualité des parties prenantes d’une innovation jouent évidemment un rôle capital dans son succès. (Voir mon livre : l’innovation réussie par la qualité éditions ISTE)